
Le monastère de Dadivank comporte de nombreuses inscriptions en arménien comme celles que montre ce prêtre, le dernier à y avoir officié avant d’en être chassé par les forces azerbaïdjanaises fin 2020.
L’alphabet arménien a été inventé par Mesrop Machtots, un moine lettré qui vécut au tournant des IVe et Ve siècles. Au service du roi, il s’inspira du parler de la cour et chercha à y adapter un alphabet. À l’issue d’un voyage d’études dans les principales écoles de langue syriaque, parlée à l’époque au Proche-Orient, il fixa la graphie, les règles phonétiques et orthographiques de l’arménien. Aux 36 lettres qu’il inventa, s’ajoutèrent au Moyen-âge deux caractères nouveaux.
Si cette invention est relativement tardive, c’est que l’écrit suscitait une certaine méfiance dans la population, qui y voyait avant tout un instrument fiscal ou idéologique au service des rois étrangers. Mais dès lors que le premier livre écrit en arménien fut la Bible, on considéra que cette écriture avait été donnée par Dieu et cette prévention se transforma en véritable culte jusqu’à nos jours. Ainsi, tous les ans, à l’automne, les Arméniens célèbrent la fête des Saints Traducteurs. A l’instigation de Mesrop Machtots, ils ont traduit les textes des premiers Pères de l’Église depuis le grec et le syriaque.
Leur rôle s’avère central car, à la mort du moine en 439, le royaume d’Arménie n’existait plus. Seules survécurent la langue et la religion. Dès lors, l’héritage de l’écriture devint un élément de cohésion fondamental pour la population. A leur suite, à toutes les époques, des Arméniens lettrés ont eu à cœur de parcourir le monde pour s’enquérir des connaissances scientifiques, historiques ou autres et les traduire, afin de maintenir la vitalité de leur culture. Aujourd’hui encore, dans la diaspora, les personnes d’origine arménienne sont nombreuses à maîtriser la langue. Elle demeure un repère, un lien tangible avec le pays des ancêtres pour ce peuple ballotté par l’histoire.