
Remontant au Ve siècle, le monastère de Tsitsernavank abriterait les reliques de Saint-Georges. La légende veut que ce soldat romain, martyrisé pour avoir refusé d’abjurer sa foi chrétienne, ait abattu un dragon terrorisant des villageois. Un exploit que nombre de peintres ont représenté.
La basilique à trois nefs de Tsitsernavank est la mieux conservée de celles datant de l’époque paléochrétienne. Comme pour beaucoup d’autres monuments religieux, le gouvernement azerbaïdjanais réécrit l’histoire en niant le passé arménien de ce monastère et en l’attribuant aux Albanais du Caucase ou Albaniens. Les habitants du royaume d’Albanie du Caucase, qui existait au premier millénaire, ont, pour une petite minorité, adopté la foi chrétienne. Les quelques milliers de descendants de ce groupe, les oudis, sont instrumentalisés par Bakou. En avril 2023, leur porte-parole annonçait que sa communauté avait « visité l’ancien temple albanais d’Agoglan (nom utilisé par les Azerbaïdjanais pour désigner Tsitsernavank), à l’occasion du mois sacré du Ramadan ». De quoi y perdre son latin…
Par sa situation géographique, le monastère de Tsitsernavank évoque un autre épisode douloureux du passé récent. Car il est situé à proximité immédiate du corridor de Latchine, cette bande de terre qui permettait de relier l’Arménie et le Haut-Karabagh, situé en territoire azerbaïdjanais, depuis le cessez-le-feu du 10 novembre 2020. Par cet accord, Bakou s’engageait à garantir la sécurité de circulation le long de ce couloir, sous le contrôle du contingent russe de maintien de la paix. Mais celui-ci regarde ailleurs lorsqu’en décembre 2022, sous des prétextes fallacieux qui ne trompent personne, les forces armées azerbaïdjanaises bloquent le corridor de Latchine. Dès lors, les habitants du Haut-Karabagh ne peuvent plus gagner l’Arménie et l’approvisionnement en nourriture, médicaments, carburant et autres biens de première nécessité se tarit. C’est le début d’une grave crise humanitaire qui ne fait qu’empirer jusqu’à septembre 2023 où la région est vidée des 120 000 personnes qui y vivaient encore.